Le CNRS vient de publier en ligne une enquête sur les jeunesses en France. Dans ce rapport de synthèse, les travaux en sciences sociales et humaines concernant cette catégorie sont passés en revue, ainsi que les thématiques actuelles. Rédigé par une équipe collective de chercheurs, ce document intitulé « Les jeunesse françaises contemporaines. Un état de l’art et des questions de recherche » est une lecture qui s’impose dans notre contexte de rentrée scolaire et universitaire, où un nouveau gouvernement doit se confronter aux enjeux actuels.
Durovic A., Duvoux N., Maljean-Dubois S., Peugny C., Tiberj V. (dir.) 2024, Les jeunesses françaises contemporaines.Un état de l’art et des questions de recherche, CNRS, en ligne https://www.inshs.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/les-jeunesses-francaises-contemporaines-un-etat-de-lart-et-des-questions-de-recherche
Des jeunesses et non pas une jeunesse
La définition des jeunesses est assez difficile et cette multiplicité des définitions implique aussi qu’on peut parler davantage de plusieurs jeunesses et non pas d’une catégorie unifiée. L’âge ne suffit plus à caractériser cette période, il faut prendre en compte l’autonomie et l’entrée dans la vie professionnelle par exemple. Mais un constat global s’impose : il y a un étirement de l’âge de la jeunesse. Si on prend en compte le niveau de vie, le logement, le marché de l’emploi, ou les revenus, les jeunesses françaises sont aujourd’hui en mauvaise posture vis-à-vis des autres pays occidentaux. On assiste par exemple à de nombreux phénomènes de précarité, mais aussi à des problèmes de santé mentale.
Dans ce rapport, plus de trente spécialistes abordent les différentes facettes du sujet. Les auteurs et autrices mettent en valeur la notion de « désavantage social » concernant les jeunesses françaises. De criantes inégalités sont présentes et la dépendance vis-à-vis des parents est renforcée. La solidarité familiale, que l’on a pu voir à l’œuvre lors de la crise du covid, est bien présente pour pallier les insuffisances actuelles de l’État social. Sans faire un compte rendu exhaustif de ce rapport très riche, on peut signaler que le 1er chapitre se penche sur la difficile définition des jeunesses. Pour caractériser cette catégorie multiple, on peut évoquer les âges, mais cela diffère selon les définitions. Est-on jeune jusqu’à 25 ans ? 26 ? ou plus ? Est-ce la période15-24 ans qui est la plus consensuelle ou celle de 18-24 ans ? Si on prend en compte cette dernière tranche d’âge, on a aujourd’hui en France plus de 5 millions de jeunes, ce qui en fait un groupe social important dans la société du pays, mais qui n’est guère au cœur des politiques publiques. On peut également raisonner en termes de « générations » avec des évènements marqueurs qui créent une identité collective. Mais autre évolution à noter : la durée des études allonge la durée de la jeunesse. La transition entre la jeunesse et l’âge adulte est de plus en plus longue. C’est ce qu’aborde le chapitre 2 consacré au sujet de l’éducation et de la formation.
Éducation, formation et engagement
Ce sujet est très régulièrement abordé par des études scientifiques collectives. La socialisation scolaire des jeunesses repose sur de nombreuses variables, où l’on peut de nouveau voir la question des inégalités sociales. On conseillera plus particulièrement la lecture de ce chapitre pour celles et ceux qui s’intéressent aux questions d’éducation car il fait parfaitement la synthèse des travaux existants et des problématiques actuelles. Les effets de la massification, la différence entre établissements scolaires, le stress ou bien encore la reproduction des inégalités sont abordés. Le contenu de ce chapitre est sans appel : « Partout, on observe une crise de l’éducation, du recrutement des enseignants, des valeurs civiques, etc. Se pose aussi la question de la culture commune, de ce que l’éducation scolaire doit à chacun indépendamment de son mérite et de ses parcours professionnels. » (p.25). De solides références bibliographiques sont mentionnées, ce qui permet d’approfondir tel ou tel point. Les questions de santé mentale, d’insertion professionnelle, des inégalités sociales et des discriminations, ou bien encore du rapport aux territoires sont abordées dans les chapitres 3 à 6. Ce sont autant de synthèses très utiles sur ces enjeux actuels. Le chapitre 7 concerne les questions d’information et d’usage des réseaux sociaux.
Les deux derniers chapitres se penchent sur la capacité d’action des jeunes et les représentations qu’ils peuvent avoir de la société et du monde politique et social. Cela implique le sujet de l’engagement dans la Cité et d’éducation à la citoyenneté. Les pages évoquant la question du vote et de la participation électorale sont particulièrement instructives. Ainsi, il est précisé que « leur rapport à la démocratie dans sa dimension institutionnelle est incontestablement plus critique que par le passé, mais ils restent fondamentalement attachés aux principes d’une démocratie ouverte et plurielle, seule à même de réconcilier les valeurs d’individualisation et le souci du collectif. » (p.110.)
Ce rapport est une synthèse très précieuse pour celles et ceux qui sont en charge des jeunes aujourd’hui en France et pour bien comprendre les enjeux actuels concernant cette catégorie. Nous en conseillons vivement la lecture qui invite d’ailleurs à mieux connaître les travaux des sciences sociales sur les jeunesses.
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