Journée d’étude « La crise sanitaire à l’école et à l’université : qu’en reste-t-il 5 ans après ? »

Évènement organisé par l’Institut Français de l’Éducation (IFÉ) de l’ENS de Lyon et le Centre amiénois de recherche en éducation et en formation de l’université Picardie Jules Verne (CAREF) et avec le soutien du Laboratoire de l’Éducation (LLE)

Cette journée d’étude visait à faire émerger une réflexion commune sur l’héritage de cette crise sanitaire à travers des interventions croisant les regards scientifiques et les témoignages d’acteurs de terrain. Ayant pu assister à cette riche journée, le Centre Henri Aigueperse en propose ici un récapitulatif ainsi que les liens vers les enregistrements des interventions.

A la question de départ « La crise sanitaire à l’école et à l’université : qu’en reste-t-il 5 ans après ? », quatre axes ont été retenus pour accompagner la recherche de réponses collégiales.

L’impact de la crise sanitaire sur les jeunes, notamment sur les enjeux de santé mentale et du bien-être à l’école, qui semble aujourd’hui s’imposer comme une nouvelle problématique éducative.

Pour Caroline COMBES, Médecin, directrice du Service de Santé étudiant de l’ENS de Lyon et Marie LAURICELLA, chargée de médiation scientifique à l’IFÉ, la crise du COVID a eu un double effet sur la question du bien-être des étudiant·es.

Tout d’abord elles constatent l’amplification de la précarisation des étudiant·es ainsi que du sentiment d’un avenir incertain ; parallèlement elles soulignent le coup de projecteur médiatique du COVID sur la souffrance psychique étudiante qui en réalité préexistait à cette crise sanitaire mais restait peu traitée de manière générale.

Elles insistent également dans leur analyse sur toutes les réformes mises en œuvre depuis ces dernières années (Parcoursup en 2018, réforme du bac en 2019, Mon master en 2020…) : pour elles, ces évolutions politiques sont nécessairement à prendre en compte comme facteurs venant peser sur les trajectoires scolaires des étudiant·e·s et leur orientation.

La crise sanitaire et les étudiants, notamment sur la question de la construction de leurs parcours d’études et les enjeux d’orientation.

Reprenant l’historique des deux phases de confinement, les trois intervenant·es suivant·es, Stéphanie MIGNOT-GERARD, maîtresse de conférences, co-responsable du Master Management Public, parcours Développement et Management des Universités à l’UPEC, Anne-Cécile CASEAU, chargée d’études et de recherche INJEP et Fellow de l’ICM et Isaïe HELIAS, responsable du pôle liaison lycée université à l’Université d’Angers, identifient les différents niveaux de réactivité des établissements au moment de la crise sanitaire, mais surtout après celle-ci, sur la question de l’accueil et de l’accompagnement de leurs étudiant·es.

Une constante identifiée est liée à la situation des établissements : plus une université compte d’étudiant·es en précarité dans son effectif plus elle va renforcer sa politique d’accueil et d’accompagnement des primo arrivants.

Une seconde constante est que le COVID n’est pas un créateur d’inégalités mais un révélateur de celles déjà existantes notamment sur les questions liées au parcours et à l’orientation. A ce titre, les précarités financière et relationnelle, accrues par la crise sanitaire, ont des effets sur les choix possibles pour les étudiant·es : ayant des ressources limitées à leur disposition, ils sont alors contraint·e·s de modifier leur trajectoire initiale au profit de filières professionnalisantes moins en adéquation avec leur projet de départ, voire d’entrer dans le monde du travail avec un diplôme de moindre hauteur qu’envisagé à l’entrée à l’université.

L’évolution ou la transformation des pratiques enseignantes pendant la période de la crise sanitaire et les héritages perceptibles aujourd’hui.

Réunissant Julien NETTER, maître de conférences HDR en sciences de l’éducation et de la formation au laboratoire CIRCEFT-ESCOL, INSPE de Créteil, UPEC, Marie GYBELY et Henrique VILAS BOAS, chargé·es d’étude au Centre Alain Savary de l’IFÉ, Maìra MAMEDE, maîtresse de conférences en sociologie au laboratoire CIRCEFT-ESCOL, INSPE de Créteil, UPEC ainsi que Pascal MERIAUX, enseignant d’histoire-géographie et formateur à la DRANE de l’académie de Lyon, cette table ronde a permis de croiser les expériences d’enseignements à distance pendant les confinements en France et au Brésil et d’en tirer trois conclusions principales.

La première conclusion de ces échanges identifie l’amplification des situations-problème existantes dans les classes : la relation pédagogique en visio, au-delà de toutes les difficultés techniques rencontrées, efface tout le travail d’explicitation et d’analyse du non-verbal habituellement déployés par les enseignants en classe pour accompagner leurs élèves et étayer leurs réflexions.

La seconde conclusion porte quant à elle sur le rôle fondamental du lien social assuré par l’école : bien que les cours en visio n’aient pas toujours permis les apprentissages visés au départ, le maintien des échanges entre les enseignants et leurs élèves a été un facteur déterminant au moment de la reprise des cours en présentiel. Au-delà des missions d’enseignement, l’attention des personnels éducatifs à préserver la relation école-famille a été essentielle et pour certain·es élèves parfois même salvatrice.

Dans la continuité, la troisième conclusion de ce temps démontre la nécessité pour l’école de se positionner en tant que collectif : l’école et l’université sont avant tout des lieux de sociabilisation visant à permettre à tout individu de trouver sa place dans le groupe. Or, la crise sanitaire a particulièrement impacté les dynamiques de lien par les restrictions et distanciations imposées ; de plus, les confinements sont venus fragiliser des relations sociales entre élèves voire parfois même ont eu un effet destructeur sur celles-ci. Le rôle de l’école en tant qu’intégrateur dans la société scolaire des citoyen·es de demain a été ainsi réaffirmé par les études menées, tant en France qu’au Brésil.

Les transformations institutionnelles induites par la crise sanitaire, en lien notamment avec la place du numérique à l’école.

Le quatrième et dernier temps de cette riche journée a réuni France et Québec avec Gérard HEINZ, Proviseur du Lycée polyvalent Aiguerande de l’académie de Lyon, expert associé IH2EF, Noëllie GOULEFER, Inspectrice de l’éducation nationale, circonscription de Lyon 4 et Caluire, académie de Lyon, Anne-Michèle DELOBBE, professeure à l’Université du Québec à Rimouski, Canada et Jean BERNATCHEZ, professeur en administration et politiques scolaires à l’Université du Québec à Rimouski, Canada (tous deux à distance).

La focale choisie pour cette table ronde, l’institution et son pilotage, a permis d’identifier plusieurs invariants à travers l’expérience des confinements.

Tout d’abord, la nécessité de « faire équipe » et ce à tous les échelons de la chaine hiérarchique. L’imposition du télétravail pendant les phases de fermetures des écoles et des services, bien qu’ayant permis de maintenir les liens à distance, ne peut pas remplacer la plus-value de temps de travail en présentiel. Il ne s’agit pas d’opposer une modalité de travail à un autre mais bien de mesurer l’importance qu’un minimum de socialisation professionnelle permise par du présentiel va avoir sur la constitution d’un collectif de travail et in fine sur son efficience y compris en distanciel.

Ce croisement d’expériences a également mis en lumière la question du « rapport à l’urgence » dans le traitement des situations scolaires : l’accélération des processus, notamment du fait de l’amplification de la communication dématérialisée, semble être devenue la norme et amène une pression supplémentaire sur les équipes. Or, le système administratif, bien que réactif pendant la crise sanitaire, n’a pas connu de transformations lui permettant de maintenir des délais de réponses réduits et les retours d’expériences démontrent même parfois des effets contre-productifs notamment dans la relation école-famille.

Enfin, le parallèle entre le Québec et la France sur la place et les usages du numériques au niveau scolaire, pourrait laisser croire à un certain retard côté français : les échanges entre experts démontrent au contraire que les deux systèmes répondent chacun à des attendus et des contraintes propres. En effet, la nécessité du respect de la vie privée via le RGPD en France et surtout en Europe s’impose comme une variable essentielle dans les différentes mises en œuvre envisagées. Bien que perfectibles, les outils numériques doivent donc, en France, se plier aux règles édictées par ce cadre légal visant à protéger les connées de tous les usagers du système scolaire.

En conclusion, la crise sanitaire et les confinements ont mis en lumière la place essentielle de l’Ecole et du système scolaire en France, de la maternelle jusqu’à l’enseignement supérieur. Les différents temps d’échange de cette journée ont dégagé de nombreuses pistes de réflexions en ce sens ; pour en retrouver l’intégralité, nous vous invitons à consulter les ressources mises en ligne par l’Ifé.

Pour aller plus loin : https://ife.ens-lyon.fr/actualites/agenda-des-manifestations/journee-detude-la-crise-sanitaire-lecole-et-luniversite-quen-reste-t-il-5-ans-apres


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