La Maison Radieuse de Rezé – un esprit collectif préservé

Cette année, les Journées du Matrimoine et du Patrimoine ont rimé avec anniversaire pour la Maison Radieuse de Rezé (Loire Atlantique).

Fêtant ses 70 ans, la Maison Radieuse construite entre 1953 et 1955 à Rezé, près de Nantes, est la seconde des cinq Unités d’Habitation dessinées par le célèbre architecte Le Corbusier[1]. En plus d’être un projet architectural novateur, la Maison Radieuse est aussi un projet Social innovant. En effet, sa construction n’est pas liée à une commande publique mais à celle conjointe de Gabriel Chereau, avocat nantais et de la Maison Familiale[2] et de son vice-président, Émile Decré.

Un projet à la genèse collective

Au moment de sa construction, la ville de Rezé, garant financier du projet ne pouvait en effet assurer que 75% du montant total nécessaire. La Maison Familiale en appelle alors aux particuliers qui, en venant contribuer au financement du chantier, acquièrent alors une part de celui-ci via la location-accession. Ces futur∙es habitant∙es, regroupé∙es en société coopérative d’habitat social obtiennent alors le statut assez rare de coopérateur∙es.

Cet habitat coopératif à grande échelle est la particularité de la Maison Radieuse de Rezé et témoigne, au sortir de la Seconde Guerre mondiale et en pleine phase de reconstruction immobilière, qu’un autre modèle d’accession à la propriété était possible.

Malheureusement, la Loi Chalandon en 1971 supprime l’habitat coopératif et clôt le chapitre communautaire de la Maison Radieuse ; pour les habitant∙es qui décident d’y rester, ce changement de statut aurait pu entrainer une césure entre ceux devenus propriétaires de leur logement et ceux devenus locataires de leur habitat  désormais étiqueté « social ». C’est sans compter l’esprit initial insufflé au moment de la construction du bâtiment : la Maison Radieuse est avant tout pensée par Le Corbusier comme un village vertical avec des services pour ses habitant∙es.  

Un esprit collectif qui perdure

Un autre dispositif vient renforcer la cohésion sociale de cette unité d’habitation : la présence, sur son toit, d’une école publique. Initialement prévue dans les plans, puis abandonnée faute de financement, c’est Georges Bénezet, alors maire de Rezé[3], qui intervient pour relancer la construction de celle-ci au regard du profil des futurs résident∙es de la Maison Radieuse, essentiellement des jeunes ménages à l’époque.

Inaugurée en 1955, l’école maternelle dessinée par Iannis Xenakis[4] (1921-2001) et dénommée « Le Corbusier », culminant à 52 mètres est la plus haute de France. À l’instar d’une école communale, l’école maternelle de la Maison Radieuse est un lieu de rassemblement pour ses habitant∙es, même si les enfants peuvent en toute autonomie s’y rendre en empruntant « rues » et ascenseurs, elle est constitutive de l’identité liée au fait d’habiter « Le Corbu ».

En témoigne les nombreuses mobilisations pour la conserver : ayant accueillit jusqu’à 150 élèves pour trois classes, elle en compte désormais deux et, du fait du vieillissement et de la diversification du profil des habitants de la Maison Radieuse, elle a vu son périmètre scolaire élargi au cours des années pour assurer sa pérennité.

S’ouvrir à l’extérieur est aussi un facteur essentiel à la vie de La Maison Radieuse : installée dans un écrin de verdure privé de plus de six hectares, l’unité d’habitation en laisse l’accès libre aux voisin∙es, aux visiteur∙euses, aux curieux∙seuses et participe ainsi à ne pas faire d’elle une ville dans la ville.

Devenue monument historique en 2001, la Maison Radieuse se visite toute l’année, vous y serez accueilli∙es par ses habitant∙es soucieux∙ses de vous faire découvrir l’art de vivre communautaire et son évolution au fil des années.

Pour aller plus loin : https://monumentum.fr/monument-historique/pa00108783/reze-maison-radieuse

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[1] Le Corbusier a construit 5 unités d’habitation : Marseille, Rezé, Berlin, Briey et Firminy

[2] Société anonyme coopérative d’HBM (Habitations à Bon Marché) créée à Nantes en 1911

[3] https://patrimoine-archives.reze.fr/page/la-ive-republique-1945-1959-

[4] https://fr.wikipedia.org/wiki/Iannis_Xenakis